L’Union mondiale rend hommage au père Adolfo Nicolás, sj
C’est avec une grande tristesse et une profonde émotion que WUJA apprend et vous partage la nouvelle du décès du père Adolfo Nicolás, sj, survenue ce mercredi 20 mai, à l’âge de 84 ans. L’ancien Supérieur général de la Compagnie de Jésus était fort proche de la jeunesse, comme enseignant des jeunes novices en Asie, mais assurait également WUJA de tout son soutien ; spirituel bien sûr, mais aussi concret en ayant pris part à deux congrès mondiaux : celui de Bujumbura en 2009 et celui de Medellín en 2013.
Au congrès mondial de WUJA à Bujumbura en 2009 : à gauche le père Adolfo Nicolás, sj, alors Supérieur général de la Compagnie de Jésus ; avec, au centre, le vice-président du Burundi de l’époque, M. Yves Sahinguvu (Lycée Saint-Esprit de Bujumbura, ads 1967) ; à droite, nous retrouvons Naresh Gupta (Collège Saint-Xavier de Calcutta, ads 1982), actuel secrétaire général de WUJA
Adolfo Nicolás Pachón est né le 29 avril 1936 à Villamuriel de Cerrato, une petite bourgade tranquille de Castille-et-León, sur la route qui mène de Valladolid à Burgos. Fils d’un militaire espagnol, il est le troisième d’une fratrie de quatre garçons. Il quitte la province dès le plus jeune âge pour la capitale, où il ira suivre ses études secondaires au Collège de l’Immaculée et Saint-Pierre-Claver, plus connu sous le nom de « Collège des Garçons d’Arènes », lequel a depuis fusionné avec le Collège de Chamartin pour devenir le Collège Notre-Dame du Souvenir, un des meilleurs établissements de Madrid. Après ses études à Madrid, il rentre directement au noviciat des jésuites situé à Aranjuez, par ailleurs résidence occasionnelle des rois d’Espagne. Il obtient en 1960 une licence en philosophie de la fameuse « Complutense », l’université d’Alcalá de Henares, ville natale du grand Cervantès.
Adolfo Nicolás, nouvellement ordonné en 1967
A sa demande, il quitte l’Espagne pour être envoyé au Japon, où il passe d’abord une année entière à apprendre la langue et la culture locales. Après avoir suivi un enseignement de théologie à l’université Sophia de Tokyo en 1964, il y est ordonné, 3 années plus tard, le 17 mars 1967. En 1968, il revient trois ans en Europe pour écrire sa thèse « Théologie du Progrès humain » qui en fera un docteur ès théologie de l’Université Grégorienne de Rome. Il se spécialise ainsi dans l’étude des théologies ayant façonné le concile Vatican II, dont il fut lui-même un contemporain.
Après être rentré au Japon où il a enseigné quelques années durant la théologie systématique à l’Université Sophia, il est nommé directeur de l’Institut pastoral de Manille, campus de Quezon City, aux Philippines, où il part s’établir de 1978 à 1984. Il rentre ensuite à Tokyo pour s’occuper des étudiants de l’université Sophia, de 1991 à 1993, puis pour devenir Supérieur provincial des jésuites du Japon, jusqu’en 1999. Après cela, il passe trois ans dans une paroisse auprès des émigrants philippins et asiatiques pauvres de Tokyo, et continue d’enseigner à l’université Sophia.
Discours du père Adolfo Nicolás après avoir été investi de la charge de Supérieur général de la Compagnie
En 2004, il devient modérateur de la conférence des Provinciaux jésuites d’Asie Orientale et Océanie, qu’il préside jusqu’en 2008, année où il est élu par ses pairs comme le 30e Supérieur général de la Compagnie de Jésus. Bien que cette charge soit habituellement à vie — même si son prédécesseur Peter-Hans Kolvenbach avait lui aussi démissionné—, il présente sa démission lorsqu’il atteint l’âge de 80 ans, arguant que « la Compagnie avait besoin de quelqu’un avec plus d’énergie et une meilleure forme pour la diriger dans un monde de plus en plus complexe ».
Lors de l’adieu du père Adolfo Nicolás à la curie jésuite en février 2017, le pape François insista pour que « Nico », comme on l’appelait entre amis, prenne le siège d’honneur
Durant ces huit années comme Supérieur général de la Compagnie, il n’eût de cesse d’insister sur l’universalité de la vocation et de la mission des jésuites ainsi que sur la profondeur qui caractérise leur vie.
Le père Nicolás célébrant la messe à la paroisse du Sacré Cœur dans la République démocratique du Congo en 2011
Après avoir remis sa démission lors de la 36e congrégation générale de la Compagnie, laquelle s’ouvrit à Rome le 2 octobre 2016 et élit l’actuel Supérieur général, le Vénézuélien Arturo Sosa, sj, le père Adolfo Nicolás reprit la route de l’Asie. D’abord aux Philippines, pour s’occuper de l’Institut pastoral de Manille, jusqu’en août 2018, où il fit son dernier voyage terrestre pour retourner à Tokyo.
Dernière photo du « père Nico » à Manille, au milieu des étudiants de l’Institut pastoral de Manille
Selon ses pairs, le père Adolfo Nicolás fut un « jésuite heureux ». Il confiait d’ailleurs aux novices d’Indonésie en 2009 : « j’espère que vous serez des jésuites heureux car vous seriez inutiles si vous étiez des jésuites malheureux. » Il s’occupait beaucoup des novices et des jeunes étudiants intéressés par entrer dans les ordres. Il leur disait : « soyez heureux, soyez libres, centrez-vous sur Dieu et sur le Christ ! » Aux jeunes jésuites, il disait : « soyez vous-mêmes et laissez-le Christ agir à travers vous ! »
Le père Nicolás soutenait toute sorte d’initiatives, notamment les congrès de WUJA comme celui ici en 2013 à Medellin
Le père Adolfo Nicolás, sj, s’est éteint dans la paix de Dieu ce mercredi 20 mai 2020, à Tokyo au Japon. Il venait d’avoir 84 ans.
L’actuel Supérieur de la Compagnie de Jésus, le père Arturo Sosa, sj, parlait de lui en ces termes : « un homme sage, simple et libre ; entièrement et généreusement voué au service ; ému par ceux qui souffrent de par le monde, mais en même temps empli de l’espoir découlant de sa foi en Notre Seigneur ressuscité ; un excellent ami, qui aimait rire et faire rire ; un homme de Parole. »
Le père Nicolás avec le pape émérite Benoît XVI
L’actuel Président de la Conférence jésuite d’Asie-Pacifique, le père Tony Moreno, sj, l’évoque comme quelqu’un « qui n’était pas connu pour se mettre en avant, qui détestait le cléricalisme dans toutes ses formes et qui ne voulait pas être appelé « Émérite ». Il voulait être connu comme il était, sans les titres. »
C’est avec une certaine émotion que notre président, Alain Deneef, adresse ces quelques mots : « Je l’ai rencontré quatre ou cinq fois et il était un homme modeste dont les conseils et les réflexions se dévoilaient au détour d’une phrase anodine à laquelle l’interlocuteur avait tout intérêt à être attentif. C’est lui qui a complété la fameuse phrase du père Arrupe (‘des hommes et des femmes pour les autres’), déjà précisée par le père Kolvenbach (‘des hommes et des femmes pour et avec les autres’), en disant : « des hommes et des femmes de profondeur, pour et avec les autres ».
Alain Deneef et Adolfo Nicolás, sj, ensemble à Rome en 2011
François Marinx, conseiller en communication et coordinateur numérique auprès de WUJA, se souvient : « Lors du Congrès de Bujumbura en 2009, une rencontre avec le Père Nicolas avait été organisée pour les jeunes participants au congrès. J’ai eu la joie d’y prendre part aux côtés d’une trentaine d’autres anciens du monde entier. En toute simplicité, il nous avait partagé quelques réflexions sur notre congrès et la dynamique des anciens élèves dans le monde. Il s’était montré très affable et accessible, notamment en se prêtant au jeu d’une longue séance photo aux côtés des jeunes. Quatre ans plus tard, lors du congrès de Medellin, il avait renoncé à son discours initialement préparé, pour évoquer l’éducation jésuite à l’aide de quatre images. Il savait captiver et toucher son auditoire pour transmettre l’essentiel. Je suis reconnaissant pour ces moments qui m’ont beaucoup marqué. »
Le père Adolfo Nicolás, sj, au congrès de 2009 à Bujumbura
WUJA présente ses plus sincères condoléances à la Compagnie de Jésus, dont il fut le Supérieur général de 2008 à 2016 ; la Conférence des jésuites d’Asie Orientale et Océanie, dont il fut le président de 2004 à 2008 ; la Province des jésuites du Japon, dont il fut le Supérieur de 1993 à 1999 ; l’Institut pastoral de Manille aux Philippines, dont il fut le directeur de 1978 à 1984 ; et à toute la communauté ignacienne de par le monde qui unit ses pensées et ses prières à l’annonce de cette triste nouvelle.